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La peinture persane, un modèle pour l’Inde

jahangir admire une peinture, collection du département des estampes et de la photographie de la bibliothèque nationale de france

   La peinture classique persane, au sens académique, est un phénomène limité à une période de deux siècles et demi. L’époque classique commença peu après le milieu du XIVe siècle, à la fin des Ilkhanides, et dura jusqu’au milieu du XVIIe siècle. [1] Après cette période, la peinture dite «classique» perdit ses caractéristiques en se rapprochant de la peinture occidentale; puis, à l’époque qãjãr, avec les changements culturels et sociaux, une nouvelle peinture naquit. La peinture classique persane était un mode d’expression assez important pour servir de modèle à l’Empire Ottoman et aux royaumes indiens. [2] Sous le règne de Shãh Esmãïl, la peinture persane devint un modèle pour l’Empire Ottoman et l’Inde.

La migration des artistes persans vers l’Inde commença sous le règne de Shãh Esmãïl et coïncida avec le règne du Grand Moghol Bãber. Ce phénomène atteignit son apogée à l’époque de son successeur Humayun Akbar, contemporain de Shãh Tahmãsb.

   En 1540, Humãyun fut forcé par une révolte afghane à se réfugier à la cour de Shãh Tahmãsb. Lors de son séjour à la cour du roi safavide, il proposa à de nombreux artistes des places à sa cour. Le soutien offert par les souverains moghols de l’Inde aux artistes et poètes persans fut une cause importante de l’immigration artistique vers l’Inde. [3] Par ailleurs, Shãh Tahmãsb cessa peu à peu de soutenir les artistes et de les financer et il semble que ce soit une autre raison de l’intensification de cette migration. [4] Le résultat fut l’apparition de l’Ecole hendi-irãni (indo-iranienne) connue aussi sous le nom de l’Ecole moghole. [5]

   A la cour de Shãh Tahmãsb, le roi Humãyun découvrit les travaux des peintres persans, et invita deux d’entre eux, Mir Seyyed ‘Ali et Abdol Ahmad à rejoindre sa cour. [6] Ces deux peintres peuvent être considérés comme les fondateurs de l’Ecole moghole de peinture. [7] Certains historiens pensent que Doust Mohammad/Doust Moayyer, qui avait rejoint la cour du prince indien Kãmrãn Mirzã (le frère de Humãyun), a également eu un rôle efficace comme chef de file de cette école moghole. [8]

Finalement, en s’intéressant à la peinture persane, en invitant des peintres, artistes et hommes de lettres persanes à sa cour, Humãyun institua un intérêt durable pour le style «persan» en Inde. Après lui, son fils Akbar fut aussi un mécène, ainsi que le successeur de ce dernier, Jahãngir (1605-1628) (son successeur). Ses goûts, toutefois, s’inclinaient davantage vers la représentation des événements de sa vie et les portraits que vers les illustrations persanes et indiennes classiques. Il était particulièrement enthousiasmé par le travail d’Abol-Hassan Nãder-oz-Zamãn, fils du peintre Aghã Rezã Herãti. [9]

   Pendant ses voyages, ce roi se faisait toujours accompagner de deux ou trois peintres pour qu’ils croquent les événements importants. Amoureux de la nature, le roi Jahãngir ordonna également à des artistes tels que Mansour et Morãd de peindre de beaux spécimens d’oiseaux, d’animaux et de fleurs, dans un style assez nouveau. L’art du portrait moghol, quant à lui, atteignit son apogée sous Shãh Jahãn, qui, comme ses prédécesseurs, fut aussi un grand mécène et collectionneur.

Notes:

[1] La deuxième moitié du XIVe siècle a été choisie comme début de l’époque classique, d’après le document théorique de Doust Mohammad et les œuvres qui nous sont parvenues. Doust Mohammad, chroniqueur des arts sous Shãh Tahmãsb (1524-1576), décrit cette période comme celle de l’invention de la peinture persane qu’il associe avec le travail d’Abou Saïd et le talent qu’il décèle chez un certain Ahmad Moussã. Il écrit à ce propos: «Ahmad Moussã […] a retiré le voile du visage de la peinture et a inventé le type de peinture qui est en cours à l’heure actuelle.»

[2] Voir Oleg Grabar, “Toward an Aesthetic of Persian Painting,”‌ in: Islamic Visual Culture, p. 220

[3] Abolfazl Allãmi, Akbar-nãma, éd. Mawlawi Aghã Ahmadi va Abd-ol-Rahim, vol. 1, Calcutta, 1877, p. 220.

[4] Ghãzi Ahmad, Golestãn-e honar (Le jardin de l’art), éd. Soheyli Ansãri, Téhéran, 1973, pp. 113-114; Eskandar BeygMonshi, Tãrikh-e ãlam ãrã-ye Abbãsi (Histoire universelle d’Abbãs), éd. Iraj Afshãr, Téhéran, vol. 1, 1955, pp. 174, 178.

[5] Percy Brown estime que cette école était une branche de la peinture safavide. (Percy Brown, Indian Painting under the Mughal, Oxford, 1924, pp. 56, 112).

[6] Ghãzi Ahmad, op. cit., p. 161.

[7] Vincent Arthur Smith, A History of Fine Art in India & Ceylon, 1969, p. 182; S.C. Welch, The Art of Mughal India, New York, 1975, p. 17.

[8] Voir Adl, Shahryãr, “Les artistes nommés Dust-Mohammad au XVIe siècle”‌, Studia Iranica, 1993, vol. 22, n° 2, pp. 249, 252, 256.

[9] Voir Jahãngir, Tûzok-e Jahãngiri (Memoirs of Jahãngiri from the first to the twelfth year of his reign), trad. Rogers, A., éd. H. Beveridge, London, 1914, p. 20

Source: Teheran.ir

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