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  • 20/6/2016
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Wim Delvoye est arrivé à Téhéran 

wim delvoye

 

Rétrospective de l’artiste plasticien belge  au Musée d’Art contemporain de Téhéran  Mars-mai 2016

Le Musée d’Art contemporain de Téhéran consacre, du 7 mars au 13 mai 2016, l’ensemble de ses huit galeries à l’exposition d’œuvres de l’artiste plasticien belge Wim Delvoye. 

 

Pendant ces trois dernières années, Wim Delvoye a passé beaucoup de temps en Iran et s’est occupé surtout de la restauration d’une ancienne maison et d’une école à Kâshân, ville située au sud de Téhéran, en espérant pouvoir y ouvrir un atelier et une galerie d’art. Il a déclaré dans un entretien que contrairement à ce à quoi il s’attendait, le processus de négociation avec le Musée d’Art contemporain de Téhéran a été « étonnamment facile ». Il n’a d’ailleurs pas tari d’éloges au sujet des responsables du musée : « Ils sont tous très professionnels, il est plus facile de travailler avec eux qu’avec Le Louvre » [1], a-t-il affirmé en faisant allusion à l’exposition de ses œuvres au musée parisien en 2012. 

 

l’exposition d’œuvres de Wim Delvoye au Musée d’Art contemporain de Téhéran est une rétrospective de sa carrière artistique depuis ses débuts, mais l’artiste plasticien belge y expose aussi de nouvelles pièces métalliques qu’il a fait fabriquer par les artistes ciseleurs de la ville iranienne d’Ispahan. Après la cérémonie d’inauguration de son exposition au sein de ce musée, Wim Delvoye s’est adressé aux invités, visiteurs et journalistes présents par l’intermédiaire de son interprète. Il a comparé l’Iran et sa culture à « un beau conte de fées », et a souhaité que le développement du tourisme permette à un plus grand nombre d’Européens de voyager dans ce pays et de le découvrir au-delà des campagnes de propagandes négatives dont il fait l’objet depuis plus de trois décennies.

 

Wim Delvoye, qui avait déjà organisé une exposition informelle de ses œuvres à Téhéran il y a trois ans, a également exprimé son admiration pour les artistes contemporains iraniens. Il a noté que pendant ses voyages successifs à Téhéran, il a pu visiter plus de 50 galeries d’art rien qu’à Téhéran, et s’est dit étonné de voir qu’il existait de nombreuses femmes parmi la jeune génération d’artistes iraniens. « Je me sens fier de pouvoir exposer mes œuvres au Musée d’Art contemporain de Téhéran. Cette institution artistique iranienne a une longue histoire derrière elle, et elle est dirigée par une équipe de direction très professionnelle. Je me réjouis, parce que je sens que j’ai encore beaucoup à faire en Iran », a-t-il déclar.

 

Wim Delvoye est né à Wervik en Belgique en 1965. Il n’est pas issu d’une famille d’artistes. C’est peut-être pour cette raison qu’il est difficile de rattacher facilement son art à des formes artistiques plus traditionnelles. Pourtant, il a eu dès son enfance une passion pour l’art, qui s’est exprimée par les dessins qu’il réalisait à l’école, ou les visites de musées en compagnie de ses parents. Cet intérêt l’a finalement conduit à s’inscrire dans une école d’art. L’une des caractéristiques importantes de son travail artistique est qu’il n’est pas facile de placer son œuvre dans la catégorie des thèmes originaux et nouveaux. Autrement dit, la répétition et la succession des thèmes connus et déjà travaillés est une marque du travail de l’artiste.

 

C’est sans doute l’une des choses qui nous permet de cerner la différence de son activité artistique vis-à-vis de celle des autres artistes contemporains. Cette tendance à la répétition des thèmes fait partie de sa position vis-à-vis de l’art et l’œuvre artistique en général. Les thèmes qu’il choisit aujourd’hui sont, en fait, les mêmes que ceux des premières années de sa carrière d’artiste. Au lieu de travailler sur des thèmes et des projets nouveaux, Wim Delvoye est de ces artistes qui croient que le vrai rôle de l’artiste est d’approfondir, de purifier et d’affiner dans le processus permanent de travailler et de retravailler sur les sujets premiers. Néanmoins, les critiques d’art distinguent parfois dans son travail artistique trois directions principales. Il est vrai que Wim Delvoye suit parallèlement ces trois axes de manière simultanée depuis des années, mais les différences qui existent entre eux peuvent nous permettre de suivre, en quelque sorte, l’évolution de son travail en tant qu’artiste.

 

Les œuvres les plus anciennes de Wim Delvoye, d’origine flamande, impliquent l’usage de techniques artistiques et de procédés artisanaux néerlandais. L’artiste se sert de ces techniques traditionnelles pour embellir les objets de la vie quotidienne. Des œuvres créées par Wim Delvoye entre les années 1988 et 1991 étaient marquées par la tradition de l’usage de la laque bleue de Delft. Mais si cette laque bleue était traditionnellement utilisée pour décorer les porcelaines fines, l’artiste a préféré l’appliquer sur des objets considérés comme purement utilitaires comme des pelles et bonbonnes de gaz. Ces objets « banals » sont devenus ainsi de très beaux objets d’art. Le choix de ce type d’objets utilitaires est un élément constant du travail artistique de Wim Delvoye, défini par certains critiques comme une « tension entre des contraires apparents »

 

 La tension dans l’œuvre de Wim Delvoye est le résultat d’une confrontation entre un « objet » et une « image » qui n’ont apparemment rien en commun. C’est ainsi que Delvoye réalise des motifs de Delft sur des bonbonnes de gaz. « C’est à tort que ses œuvres sont constamment reliées au mouvement kitsch. En effet, si le kitsch se caractérise par l’abolition de toute signification, l’œuvre de Wim Delvoye génère sans cesse de nouvelles significations. La façon dont il décore ou ennoblit les objets ne se veut pas décorative : c’est la nature même de l’objet qui en est transformée. » Cependant, la première œuvre « monumentale » de l’artiste belge qui l’a rendu célèbre est sans doute sa Bétonnière. Le projet a commencé en 1990 et ne s’est terminé qu’en 1999. Il consistait en la réalisation d’un camion-bétonnière Nissan grandeur nature, taillé dans du bois et dans un style flamand baroque du XVIIe siècle. L’artiste n’a pas pu trouver en Belgique d’artisans maîtrisant les techniques nécessaires pour ce type de taille sur bois. Il a cependant réussi à trouver des travailleurs en Indonésie, une ancienne colonie belge, qui avaient gardé le savoir-faire des anciens artisans belges, savoir-faire qui avait été oublié en Belgique. Avec sa Bétonnière, Wim Delvoye s’est fait connaître comme un artiste rendant hommage aux techniques anciennes, mais qui se rebelle aussi contre la tyrannie des restrictions de la convention artistique.

 

Wim Delvoye est un artiste qui réalise le même projet artistique en masse. Lorsqu’il fait une pelle ou une bonbonne de gaz décorée de laque bleue de Delft, il ne se contente pas de prototypes, il en réalise toute une série d’une manière quasi-industrielle. Cette idéologie d’objets d’art produits en masse est l’une des particularités du travail de Wim Delvoye.

 

  Par la suite, l’artiste belge est passé du baroque au gothique. Comme avant, il a gardé son intérêt pour les camions, les véhicules et les machines de construction comme à l’époque de sa Bétonnière, mais ce passage du baroque au gothique a été aussi pour lui l’occasion de moderniser son matériel en passant de la laque bleue et du bois taillé à l’acier découpé au laser. Wim Delvoye s’est concentré sur une série d’œuvres qu’il continue à réaliser aujourd’hui. Remorque (2007) en est un exemple représentatif. Elle consiste en un camion posé sur la remorque d’un deuxième camion, le tout étant réalisé avec de l’acier. L’œuvre est particulièrement moderne et ses décorations gothiques sont incroyablement délicates. Wim Delvoye a créé un nombre considérable de maquettes de ce type, dont la taille varie entre un et deux mètres de long. Bien que ces maquettes soient de taille réduite par rapport aux originaux de l’artiste, elles sont aussi élégantes que les versions grandeur nature. L’artiste belge a aussi développé ses motifs gothiques dans un domaine davantage similaire à l’usage traditionnel de ce style d’architecture : il a donc réalisé des tours avec ses mêmes techniques que ses camions et machines industrielles.

 

Le projet le plus célèbre et grandiose de Wim Delvoye est sans doute son œuvre Cloaca de renommée internationale. Cloaca est une série de machines qui imitent le système digestif humain. Alimentées par de la nourriture, ces machines - conçue à l’aide d’une équipe de scientifiques - produisent des déchets similaires, avec une précision scientifique, aux matières fécales. Le concept de Cloaca provient de l’attention de l’artiste belge au consumérisme du monde contemporain. En effet, les logos des machines de Cloaca sont semblables aux célèbres logos de produits de consommation comme Coca-Cola et la compagnie fruitière Chiquita. Selon Wim Delvoye, qui s’est inspiré de la « eating machine » (machine à manger) de Charlie Chaplin dans Les Temps modernes (1936) dans une société de consommation contemporaine, la conséquence inévitable de ce type de projet est la création d’une sorte de machine complexe ne servant aucun but utile. Ainsi, le projet le plus absurde qui lui est venu à l’esprit était de créer une machine qui ingurgite de la nourriture et la transforme en déchets.

 

  Avec cette idée initiale, Delvoye a collaboré pendant huit ans avec des experts de différents domaines comme la gastroentérologie, la bactériologie, l’informatique et la plomberie. Cloaca Original a ainsi été créée en 2000. Quand la machine marche, les repas sont insérés par l’une des extrémités. A l’autre extrémité se trouve un plateau qui collecte les déchets. Entre les deux extrémités de la machine, un ordinateur gère le processus complexe de « digestion » avec tous les produits chimiques et enzymes nécessaires. Wim Delvoye a fabriqué au total quinze machines Cloaca. Le nombre d’exemplaires de cette machine inutile est une critique de la société de consommation, mais aussi une métaphore de la condition humaine, le corps de l’homme se trouvant réduit à une machine.

 

  En tant qu’artiste, Wim Delvoye bénéficie d’une réputation internationale, avec de nombreuses expositions en Europe et dans les autres parties du monde. Il a participé à un grand nombre d’événements artistiques internationaux majeurs dont la Biennale de Venise, ainsi que les biennales de Lyon, de Pékin, de Corée du Sud et du Monténégro. Il est représenté par une quinzaine de galeries d’art dans le monde comme à Bruxelles [ et à Paris.

 

 Les œuvres « iraniennes » de Delvoye    

Les nouvelles œuvres « iraniennes » de l’exposition de Téhéran comprennent une série de valises en aluminium de la marque Rimowa, ciselées par des artistes d’Ispahan travaillant d’habitude sur de l’argent ou du bronze. Ces derniers ont ciselé l’aluminium à la demande de l’artiste belge avec des motifs traditionnels iraniens. L’autre œuvre « iranienne » de l’exposition de Wim Delvoye est le cadre d’une voiture de sport Maserati décorée avec une technique similaire.

 

 Le Musée d’Art contemporain de Téhéran    

Un an avant l’exposition des œuvres de Wim Delvoye, le Musée d’Art contemporain de Téhéran avait organisé une rétrospective sur l’artiste allemand Otto Piene en février 2015 ; mais avec l’exposition de Delvoye c’est la première fois que ce musée consacre tout son espace, y compris huit galeries et les jardins, à un artiste non-iranien. En octobre 2015, un accord entre l’Iran, les musées d’Etat de Berlin et la Fondation culturelle prussienne a été conclu. Selon les termes de l’accord, il est prévu que le Musée d’art contemporain de Téhéran envoie une sélection d’œuvres de sa grande collection d’art occidental du XXe siècle ainsi que des œuvres d’artistes iraniens à Berlin pour une grande exposition en 2016. Il pourrait aussi permettre aux tableaux de Gauguin, Picasso et Rothko de voyager au-delà de Berlin, peut-être aux Etats-Unis et au musée Hirshhorn, ou encore au Sculpture Garden de Washington.

 

SOURCE: http://www.teheran.ir

 

 

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