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  • 19/1/2013
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L’islamophobie pour décrire une réalité coloniale

l’islamophobie

   L’islamophobie est ainsi définie comme un mode de gouvernement, un traitement différentiel fondé sur un critère religieux, dont la valeur est déconnectée de toutes considérations morales et déterminée au contraire par un politique de domination pragmatique. L’islamophobie s’oppose à l’«islamophilie», «préférence accordée aux musulmans», qui n’est pas forcément le mode de gouvernement le plus approprié en Afrique de l’Ouest parce qu’il déboucherait sur l’inimitié de la majorité des colonisés non-musulmans.

L’islamophobie de gouvernement est par ailleurs associée à ce que Marty appelle «l’islamophobie ambiante», qui n’est pas restreinte aux seuls cercles de l’administration coloniale.

   Or, selon ces administrateurs-ethnologues, l’islamophobie ambiante s’appuie sur une islamophobie savante. Dans une recension du livre L’âme d’un peuple africain: les Bambara de l’abbé Henry (1910), Delafosse dénonce l’«islamophobie féroce» de sa description des coutumes Bambara, mais c’est Quellien qui élabore la critique la plus systématique de l’islamophobie savante. Dans sa thèse de droit sur la «politique musulmane dans l’Afrique occidentale française», soutenue et publiée en 1910, il définit l’islamophobie comme un «préjugé contre l’Islam»:

«L’islamophobie – Il y a toujours eu, et il y a encore, un préjugé contre l’Islam répandu chez les peuples de civilisation occidentale et chrétienne. Pour d’aucuns, le musulman est l’ennemi naturel et irréconciliable du chrétien et de l’Européen, l’islamisme est la négation de la civilisation, et la barbarie, la mauvaise foi et la cruauté sont tout ce qu’on peut attendre de mieux des mohamétans.»

   Or, pour Quellien, il «semble que cette prévention contre l’Islam soit un peu exagérée, le musulman n’est pas l’ennemi né de l’Européen, mais il peut le devenir par suite de circonstances locales et notamment lorsqu’il résiste à la conquête à main armée». Pour démontrer que le musulman n’est pas l’ennemi de l’Européen, il s’appuie sur les témoignages des «explorateurs» Adolf Overweg et Heinrich Barth, membres d’une expédition scientifique britannique en Afrique (1849), et de Louis-Gustave Binger, officier et administrateur colonial français en Côte d’Ivoire, qui ont été « fort bien reçus dans les villes et chez les tribus mohamétanes» et n’ont «jamais [été] inquiétés à cause de leur religion». Quellien considère que l’Islam a une «valeur morale incontestable» et qu’il «a partout élevé le sens moral et l’intelligence des peuples qu’il a arrachés au fétichisme et à ses pratiques dégradantes».

Il s’inscrit donc en faux contre l’opinion de l’explorateur-géologue allemand Oskar Lenz qui considère que «l’Islam est l’ennemi de tout progrès et qu’il n’existe que par la force de sa propre inertie qui le laisse inattaquable» ou que «l’Islam veut dire stationnement et barbarie, tandis que le Christianisme représente la civilisation et le progrès».

Source: Islamophobie.hypotheses.org/193

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