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  • 3/3/2012
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Najaf et Karbalã, sanctuaires du chiisme

najaf

   Les villes saintes du chiisme en Irak ont été fondées autour des tombaux des imams Ali et Hussein. Par leur caractère sacré, Najaf, Karbalã, Samara, et Kazimayn devinrent le lieu de résidence de nombreux oulémas chiites ainsi que des centres religieux et culturels pour l’enseignement du dogme duodécimain. Elles représentaient également d’importants centres de pèlerinages chiites. Najaf et Karbalã sont cependant devenues, au fil du temps, les deux sites majeurs de pèlerinage chiites en Irak et ont émergé comme les plus importants centres d’enseignement et d’autorité religieux du monde chiite entre les années 1791 et 1904.1

Au dix-huitième siècle, fuyant la chute de la dynastie safavide aux mains des Afghans sunnites et l’arrivée au pouvoir de Nadir Shah ainsi que des conditions de vie de plus en plus difficiles, un nombre important d’oulémas iraniens ont émigré vers les deux villes saintes de Najaf et Karbalã. Cette émigration massive - liée à la chute des Safavides et à la crise en Iran - associée au déclin de l’enseignement chiite en Iran va transformer les deux lieux saints en principaux centres d’érudition chiite au dix-huitième siècle.2 Elles perdront néanmoins progressivement ce statut au cours du vingtième siècle.

   Durant le 19ème siècle, les chiites d’Irak reconnaissaient l’autorité religieuse et politique des grands marja’ des villes saintes, alors en grande majorité persans. C’est à cette période et dans ces lieux que la structure et le contenu de l’enseignement supérieur chiite et de l’institution de l’autorité religieuse se sont finalisés pour perdurer jusqu'à ce jour. Ce qui rend unique la communauté d’enseignement dans ces villes saintes est le fait qu’elle a été fondée largement par les oulémas eux-mêmes dans le but de devenir un centre de savoir et d’apprentissage, et non par l’Etat ou par des notables à des fins politiques, administratives ou sociales. Ainsi ce centre d’apprentissage était-il largement indépendant du pouvoir 3.

En outre, la faiblesse du pouvoir ottoman à Bagdad a permis aux oulémas des villes saintes de se dégager de toute interférence du gouvernement. Ainsi, à la différence des oulémas et des institutions sunnites de Baghdad, Mossoul et Bassorah, les oulémas chiites n’étaient pas les intermédiaires locaux du pouvoir et ils jouissaient de ce fait d’une indépendance totale 4.

Notes:

1. Meir Litvak, Shi’i scholars of nineteenth-century Iraq: The ‘ulama’ of Najaf and Karbalã’, Cambridge University Press, 1998, p.1

2. Ibid, p.13

3. Ibid, pp.1-2

4. Pierre-Jean Luizard, La formation de l’Iraq contemporain: le rôle politique des oulémas chiites à la fin de la domination ottomane et au moment de la création de l’Etat irakien, CNRS Editions, 2002, p.199

Source: Barah Mikhail, La question de la Marja’iyya chiite, Paris: IRIS, 2005

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