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  • 1/1/2011
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La reconnaissance des chiites de Turquie

selahattin ozgunduz (à gauche), chef religieux des chiites de turquie, reçoit pour la première fois le premier ministre, à l’occasion de l’achoura

Sami Kiliç

   A l’occasion de l’Achoura, le Premier ministre Erdogan s’est rendu, pour la première fois, à la cérémonie des chiites de Turquie. Le lendemain, il rejoignait Kémal Kiliçdaroglu, le leader du CHP, pour le Seb-Arus qui commémore la mort de Mowlãnã.

   50.000 jafarites, du nom de l’Imam Jafar Al-Sãdiq (702-765), s’étaient rassemblés à Istanbul pour commémorer l’anniversaire du martyre de Hussayn, petit-fils du Prophète, décapité à Karbalã en 680 (l’an 61 du calendrier islamique) par les troupes de Yazid, le calife omeyyade. Les chiites de Turquie, dont le nombre varie entre 500 000 et trois millions, organisent un jour de deuil tous les ans, le 10 du mois islamique Muharram, le jour de l’Achoura, littéralement «Dixième jour».

   Cette année, le Premier ministre a tenu à y assister. Il a été accueilli par des élégies et des prières sur le Prophète, les applaudissements étant bannis, deuil oblige.

Citant abondamment les paroles du Prophète sur l’amour de sa famille (Ahl ul-Bayt), il a ajouté: «depuis 1370 ans, nos prières, nos clameurs, notre cri, nos élégies retentissent sous la voûte céleste. Depuis ce jour-là, nous savons que le ciel et la terre pleurent, nous savons qu’à Karbalã, le désert, les eaux, les mers pleurent, au firmament, les anges pleurent (…). Tous les 10 du mois de Muharram, jafarites, alévis, sunnites, nous sommes tous unis pour dire du fond du cœur, Ô le martyr! Ô l’opprimé! Ô la victime! Ô Hussayn. Nous ressentons la douleur de Karbalã au plus profond de notre être ».

«Tu t’es mis à voler»

   En outre, à l’approche des élections législatives, Erdogan a tenu à délivrer un message de soutien aux chiites: «les problèmes de tous les groupements religieux dans mon pays me concernent». Il a annoncé la modification des programmes scolaires pour qu’ils comprennent plus d’informations sur les jafarites et leurs cultes.

Selahattin Özgündüz, le chef religieux des chiites de Turquie, a profité de la présence du Premier ministre, pour demander que leurs mosquées ne soient plus affiliées au Diyanet, Direction des affaires religieuses, accusée souvent de faire la promotion du sunnisme.

   Il a, en outre, demandé plus de représentativité politique pour les chiites et la transformation du jour de l’Achoura en jour férié. La cérémonie s’est terminée par des dons de sang au profit du Croissant rouge. En effet, depuis quelques années, les chiites ont remplacé les scènes de flagellation par ces collectes.

Kemal Kiliçdaroglu, le président du CHP (parti kémaliste), n’était pas présent mais il s’est rattrapé en assistant à une autre cérémonie religieuse, celle du Seb-Arus, littéralement «la nuit de noces» qui commémore la mort de Jalãl Al-dîn Rûmî dit Mowlãnã, grand mystique anatolien (1207-1273). Erdogan et Kiliçdaroglu en ont profité pour s’envoyer des piques à travers les paroles de Mowlãnã. Le leader du CHP s’est attardé sur l’éthique des gouvernants: «Ô toi le dirigeant, ta force est la justice, non la véhémence (…) On t’a demandé de veiller, tu t’es mis à voler».

   La référence à la rumeur colportée par les documents de Wikileaks selon laquelle Erdogan aurait huit comptes dans les banques suisses était à peine voilée. Le Premier ministre a commencé son discours par une louange à Dieu en persan et attiré l’attention sur l’inanité de la vie terrestre: «Lorsque Mowlãnã parle de la Nuit de noces, il veut dire cela: les postes, les positions, les grades ne sont que temporaires (…) il faut garder en tête que nous allons tous mourir, nous devons refuser le mensonge et la calomnie». Sans doute une mise en garde contre Kiliçdaroglu qui s’était empressé de demander au Premier ministre d’apporter la preuve qu’il n’avait pas d’argent placé en Suisse …

Source: http://www.zamanfrance.fr

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