Eléments d’analyse des attentats de Paris du 13 novembre 2015 (2)
Hypothèse 3: mise en place d’un gouvernement mondial
La réponse à ces évolutions, logique en apparence, consiste à mettre en place un gouvernement mondial. En théorie, celui-ci permet d’apporter des solutions aux défis suivants:
- Défis planétaires (de type réchauffement du climat)
- Mondialisation des échanges
- Facilitation des communications
Cependant, le projet mondialiste actuellement mis en avant par les Etats-Unis d’Amérique et les élites mondialisées introduit des postulats contestables comme:
- La nécessité d’une hégémonie américaine à la stabilité de la scène internationale
- La méthode coopérative n’est pas fonctionnelle; il faut lui préférer la méthode réaliste du rapport de force
- Les peuples ne sont pas capables d’identifier, de gérer et de solutionner les problèmes auxquels ils sont confrontés
- L’être humain, de manière général, n’est mû que par une volonté insatiable d’optimisation de ses intérêts personnels
Ces éléments conduisent à l’hypothèse suivante.
Hypothèse 4: translation du centre de gravité du pouvoir et abandon du système démocratique
Le centre de gravité du pouvoir ne tourne plus, selon cette idéologie, autour de la question démocratique. La politique, c’est-à-dire la méthode de gouvernement de l’ordre public, se soumet à un impératif économique que seul les agents autorisés par le grand capital sont autorisés à définir. Progressivement, le droit des créanciers et des actionnaires prend le pas sur toute autre considération collective: émerge alors le «règne des oligarchies» que l’économiste Alain Cotta déplore dans un ouvrage homonyme (Le règne des oligarchies, 2011).
L’ensemble du corps social est assujetti au financement privé de l’activité économique dont il s’est rendu dépendant. Les financiers jouent sur l’ambiguïté suivante: «nous servons l’intérêt public quand cela nous est profitable, mais nous exigeons que l’intérêt public nous finance quand cela nous évite de subir des pertes». C’est toute la problématique des externalités et de la théorie des biens communs et des choix publics, qui consiste fondamentalement à privatiser la question socio-politique.
Cette transformation progressive du statut du pouvoir et de sa relation au pouvoir économique devait un jour ou l’autre se répercuter sur la nature même du pouvoir politique. Le pouvoir politique ne reposerait désormais plus sur une recherche de légitimité (à qui le pouvoir revient-il légitimement?) mais sur la dialectique de l’efficacité économique, entendue comme la profitabilité de l’actionnariat. Malgré l’inefficacité mille fois démontrée du système mercatique pur (marché) en termes d’allocation des capitaux, de répartition de la valeur ajoutée, de concurrence saine et équitable, d’amélioration de la situation économique générale, celui-ci est mis en avant par des clercs patentés sous la protection d’élites politiques largement cooptées. Le système démocratique est alors décrié comme étant moins efficace – c’est-à-dire moins profitable pour l’actionnariat mondial. Alors que le régime démocratique (demos cratos = pouvoir au peuple en grec) pouvait servir le système capitaliste sous sa forme libérale, ce n’est plus le cas quand il s’agit du système capitaliste oligopolistique généré par la concurrence de multinationales d’échelle planétaire. Mais loin est le temps où l’on enseignait et étudiait sereinement la classification aristotélicienne des méthodes de pouvoir (timocratie, tyrannie, démocratie, oligarchie, aristocratie, etc.). Aujourd’hui, on passe d’un dogme à l’autre, sans réflexion préalable, depuis le dogme démocratique imposé par l’événement au dogme oligarchique imposé par la volonté des puissants. Or, comme la pensée politique et populaire n’a pas atteint le degré propre à former un peuple mondial cohérent et suffisamment en phase avec l’intérêt immédiat de ces oligopoles, la relation politique du pouvoir devait se démarquer des attentes des peuples nationaux. On comprend alors que de source légitime de pouvoir politique, le peuple en devienne l’ennemi principal.
Auteur: Samizdat
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