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  • 2/12/2007
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L’affaire Faurisson (1981-2007)

Biographie de Robert Faurisson

   Robert Faurisson, né le 25 janvier 1929, est un universitaire français et critique littéraire, condamné à plusieurs reprises pour négationnisme.

   Maître-assistant à la Sorbonne1, puis maître de conférences en littérature contemporaine à l’université Lyon II2, il est le plus connu des partisans français du discours négationniste3, niant l’existence des «chambres à gaz homicides», des camps d’extermination (qu’il considère comme de simples camps de concentration) et, plus généralement, de la réalité du génocide des Juifs commis par les nazis durant la Seconde Guerre mondiale.

 

robert faurisson

De la littérature au négationnisme

      En 1961, Robert Faurisson publie dans la revue Bizarre, éditée par Jean-Jacques Pauvert, une étude de l’oeuvre d’Arthur Rimbaud, sous le titre A-t-on LU Rimbaud ?4. Lors de sa première édition, le texte est signé des simples initiales R. F., l’auteur souhaitant alors garder l’anonymat. Dix ans plus tard, il présente sa thèse de troisième cycle sur Lautréamont, où il entend démontrer que Les Chants de Maldoror sont en réalité une parodie. La vision de Faurisson est tout aussi controversée, et se voit notamment accusée par le critique Pierre Albouy de «poujadisme intellectuel»5.

   Robert Faurisson se fait surtout connaître du grand public en 19796, lors de la publication d’une lettre tribune envoyée par lui au quotidien Le Monde. La polémique qui suit et diverses menaces pour sa sécurité physique, l’ont conduit à quitter le poste qu’il occupait à l’université Lyon II. Il est ensuite affecté à l’enseignement à distance. Il a fait l’objet de plusieurs agressions, dont une en 1989 qui lui a valu une fracture de la mâchoire.

faurisson hospitalisé après une agression par des membres du bétar-tagar

  Robert Faurisson a rapidement eu le soutien de Pierre Guillaume. Il s’est présenté plusieurs fois comme un homme de gauche (il a d’ailleurs adhéré à l’Union des athées, association généralement classée à gauche) tandis que ses contradicteurs, dont Pierre Vidal-Naquet7, le considèrent comme un sympathisant d’extrême droite de longue date (certains éléments de ce milieu ayant une tradition d’antisémitisme virulent).

Il a été condamné à plusieurs reprises par la justice française, notamment pour «contestation de crime contre l’humanité» en vertu de la loi Gayssot.
assemblée nationale française au palais bourbon à paris

Procédures judiciaires

1981-1998

   La première condamnation est prononcée le 8 juillet 1981. Robert Faurisson est condamné au franc symbolique pour avoir déclaré que «Hitler n’a jamais ordonné ni admis que quiconque fût tué en raison de sa race ou de sa religion». La peine est confirmée en appel deux ans plus tard8. Ce jugement ayant été publié partiellement dans le recueil Dalloz-Sirey du 3 février 19829, Faurisson attaque en 1983 la SA Dalloz en vue d’obtenir des dommages-intérêts; le TGI de Paris reconnaît le caractère fautif de coupures non signalées et condamne la société défenderesse à la seule publication du jugement de 198310.

faurisson au tribunal

   Robert Faurisson est condamné, le 18 avril 1991, à cent mille francs d’amende avec sursis pour «contestation de crime contre l’humanité», par la 17e chambre correctionnelle de Paris. Dans un entretien au Choc du mois (septembre 1990), il déclarait, notamment, que « le mythe des chambres à gaz est une gredinerie» et qu’il a «d’excellentes raisons de ne pas croire à cette politique d’extermination des juifs, ou à la magique chambre à gaz, et on ne me promènera pas en camion à gaz.» Patrice Boizeau, directeur de la publication du mensuel, a, lui aussi, été condamné, à trente mille francs d’amende et à verser vingt mille francs de dommages et intérêts à chacune des onze associations d’anciens déportés qui s’étaient constituées partie civile. Le tribunal a également ordonné la publication du jugement dans quatre quotidiens, à raison de quinze mille francs par journal11.

   Le Comité des droits de l’homme des Nations Unies a estimé, le 8 novembre 199612, que la France n’avait pas violé le paragraphe 3 de l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques en condamnant Faurisson sur la base de la loi Gayssot (cour d’appel de Paris, 9 décembre 1992).

Il est condamné, le 27 avril 1998, à vingt mille francs d’amende pour «contestation de crime contre l’humanité», par la 17e chambre correctionnelle de Paris, pour avoir nié l’existence de la Shoah dans un courrier publié dans l’hebdomadaire Rivarol le 12 juillet 199613.

logo du conseil représentatif des institutions juives de france créé en 1944

12 octobre 2000

   Condamnation par le Tribunal correctionnel de Paris de Stéphane Khémis, directeur de la publication du magazine L’Histoire, pour refus d’insertion d’un droit de réponse de Faurisson. Condamnation confirmée le 19 décembre 2001 par la Cour d’appel de Paris14.

Condamnation du 4 juillet 2007

   La dernière condamnation en date fait suite à la plainte déposée par le MRAP, la LICRA et la LDH à la suite des propos tenus en février 2005 sur la chaîne iranienne Sahar 115. Il contestait l’existence d’une tentative d’extermination des Juifs par le régime nazi, affirmait que les nazis cherchaient une «solution territoriale» consistant à installer les Juifs dans un autre pays (comme la Palestine) pour qu’ils ne soient plus des «parasites» et attribuait à des épidémies les décès des personnes dont les cadavres apparaissent sur des photographies.

la chaîne d’information sahar censurée par le csa en février 2005

   C’est dans ce contexte que le 10 février 2005, l’autorité française de radiodiffusion, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), a ordonné à Eutelsat, un opérateur par satellite, d’arrêter la diffusion de la télévision publique iranienne Sahar-1.

Cette décision a été confirmée par le Conseil d’Etat le 3 mars 2005. Une procédure semblable avait été engagée par le CSA le 7 décembre 2004 à l’encontre de la chaîne libanaise Al-Manar.

    Le 13 décembre 2004, le Conseil d’État avait rendu une ordonnance de référé qui ordonne à l’opérateur de satellite Eutelsat de cesser la diffusion d’Al-Manar sous 48 heures sous peine d’astreinte de 5.000 euros par jour de retard. Le 14 décembre 2004, la chaîne libanaise avait décidé d’arrêter «volontairement» sa diffusion via le satellite Hot Bird 4.

manifestation au liban contre la censure d’al-manar par le csa français en 2004

      Il a reconnu que les propos qui lui étaient reprochés exprimaient le fond de sa pensée, mais a déclaré qu’il ne se souvenait pas s’il avait effectivement tenu ces propos et qu’il ignorait que les propos reprochés étaient destinés à être diffusés sur une chaîne de télévision par satellite qu’on peut capter en France.

   Son avocat, Éric Delcroix, a demandé au tribunal de refuser l’application de la loi Gayssot, dont l’adoption constituerait une voie de fait de la part du législateur; pour lui, reconnaître l’existence de cette voie de fait, qu’il rapproche des voies de fait commises par l’administration, ne constituerait pas un contrôle de constitutionnalité des lois, contrôle que les juridictions françaises refusent d’effectuer (il estime utile de répéter cette argumentation devant plusieurs tribunaux, jusqu’à obtenir gain de cause, car il a réussi précédemment à faire écarter l’application, par la justice française, de la législation relative aux contrôle des publications étrangères)16.

   Citant une déclaration de Faurisson, selon laquelle les peines prononcées à son encontre étaient de plus en plus légères, le parquet a estimé qu’une peine plus sévère qu’une amende était nécessaire, et il a requis une peine de prison, avec ou sans sursis. Le jugement rendu le 3 octobre 2006 l’a condamné à trois mois de prison avec sursis et 7500 euros d’amende.17

  Le 4 juillet 2007, la 11e chambre de la Cour d’appel de Paris a confirmé la décision du tribunal correctionnel. Elle a cependant porté le montant des dommages-intérêts à mille euros, contre un euro symbolique en première instance, pour chacune des trois associations parties civiles18.

Procès contre Robert Badinter

      En 2007, il attaque en justice Robert Badinter, estimant que ce dernier, en le traitant de «faussaire de l’histoire» lors d’une émission sur Arte, a tenu des propos diffamatoires. Lors de la première journée d’audience au tribunal de grande instance de Paris, le 12 mars, Robert Faurisson a réaffirmé que «les prétendues chambres à gaz hitlériennes et le prétendu génocide des juifs forment un seul et même mensonge historique19.» À l’audience, le ministère public a estimé que le jugement de condamnation de Faurisson de 1981 «constitue un réquisitoire implacable qui [lui] a donné l’ensemble des attributs du faussaire20». Le jugement, rendu le 21 mai, estime que la condamnation de M. Faurisson reposait «non sur des considérations morales» mais sur « la responsabilité professionnelle» de l’universitaire qui avait «tenté d’appuyer sur une prétendue recherche critique à caractère scientifique et historique sa volonté de nier les souffrances des victimes du génocide des juifs, de réhabiliter les criminels nazis qui l’ont voulu et exécuté et de nourrir ainsi les provocations à la haine ou à la violence à caractère antisémite». En utilisant le mot de « faussaire », relève le tribunal, M. Badinter a «donc conservé une parfaite modération dans le propos 21.» En conclusion, le tribunal a débouté Robert Faurisson et l’a condamné à verser 5000 euros à Robert Badinter au titre des frais de justice.21

Affaire des propos tenus à Téhéran

   Le 11 décembre 2006, Robert Faurisson participe à une conférence sur l’Holocauste organisée à Téhéran et qui rassemble les principaux négationnistes du monde entier. L’ex- président Jacques Chirac demande alors l’ouverture d’une enquête préliminaire au sujet du discours qu’il prononce à l’occasion de la conférence.

conférence de téhéran du 11 décembre 2006 intitulé : « holocauste, une vision globale »

   Le parquet de Paris le 4 juillet 2007 confirme qu’il a effectivement ouvert une procédure contre les propos tenus à Téhéran par Robert Faurisson, afin de déterminer quels propos exacts ont été reproduits, et sur quels médias diffusés en France.

 

faurisson à téhéran en compagnie du groupe de religieux juifs natura kartai

Publications

• « A-t-on LU Rimbaud?», Bizarre n°21-22, 1961.

• A-t-on bien lu Lautréamont?, Gallimard, 1972.

• Mémoire en défense contre ceux qui m’accusent de falsifier l’histoire, La Vieille Taupe, 1980.

• Réponse à Pierre Vidal-Naquet, La Vieille Taupe, 1982.

• Écrits révisionnistes (4 volumes), Édition privée hors commerce, 1999.

 

Bibliographie

• Pierre Bridonneau, Oui, il faut parler des négationnistes: Roques, Faurisson, Garaudy et les autres, Éditions du Cerf, coll. « L"histoire à vif », Paris, 1997, 117 p. (ISBN 2-204-05600-0) (lire en ligne)

• François Brigneau, Mais qui est donc le professeur Faurisson?: Une enquête, un portrait, une analyse, quelques révélations, Publications F.B., coll. «Mes derniers cahiers», 2e série, n° 1, Paris, 1992, 80 p.

• Collectif (Éric Delcroix, Jean-Gabriel Cohn-Bendit, Serge Thion, Claude Karnoouh, Vincent Monteil, Jean-Louis Tristani) Intolérable intolérance, Editions de la différence, 1981.

• Valérie Igounet, Histoire du négationnisme en France, Éd. du Seuil, 2000.

• Pierre Vidal-Naquet, «Un Eichmann de papier» et «De Faurisson et de Chomsky», dans Les Assassins de la mémoire, La Découverte, 2005 (1re ed.: 1987) (lire en ligne).

•  (en) Lucy S. Dawidowicz, «Lies About the Holocaust», Commentary, décembre 1980, pp. 31-38

Notes

1.Nadine Fresco, «Les redresseurs de morts. Chambres à gaz: la bonne nouvelle. Comment on révise l’histoire » paru dans Les Temps modernes, n° 407, juin 1980.

2. Rapport Rousso, septembre 2004.

3. «Le négationniste Robert Faurisson a été condamné à trois mois de prison avec sursis», Le Monde, 3 octobre 2006.

4. Présentation sur artworldbooks.com

5. Pierre Vidal-Naquet, qui fut le camarade de lycée de Robert Faurisson, assure que ce dernier professait des opinions néo-nazies dans son adolescence. Cf. Pierre Vidal-Naquet, Mémoires, tome 1, Seuil, 1995

6. « Viscéralement antisémite, voilà ce que vous êtes M. Faurisson», L’Humanité, 3 avril 2007.

7. Recueil Dalloz-Sirey du 3 février 1982, pp. 59-61, suivi d’une note de Bernard Edelman.

8. TGI Paris (1re chambre, 1re section), Faurisson c. S.A. Dalloz, 23 novembre 1983, publication judiciaire au recueil Dalloz-Sirey en 1985, pp. 375-376 (confirmé par la CA Paris, 8 mars 1985).

9.« Pour contestation de crimes contre l’humanité— M. Robert Faurisson est condamné à 100 000 francs d’amende avec sursis», Le Monde, 29 avril 1991.

10.Comité des droits de l’homme des Nations unies : Communication No 550/1993 : France. 16/12/96

11.«Robert Faurisson a été condamné pour contestation de crime contre l’humanité», Le Monde, 29 avril 1998.

12.Cour d’appel de Paris, 11e chambre (section A), reproduit dans la Gazette du Palais, 10 avril 2003, n° 100, p. 2, note Daniel Amson (confirmant Tribunal de grande instance de Paris, 12 octobre 2000, n° d’affaire : 8305888). Le commentateur critique la condamnation, la réponse de Faurisson pouvant nuire à l’intérêt des victimes de la déportation et constituer une apologie de la contestation des crimes contre l’humanité.

13.« Procès correctionnel du révisionniste Robert Faurisson reporté au 11 juillet», Agence France-Presse, 20 juin 2006 ; Marie-Laure Colson, «Ces négationnistes qui votent Ahmadinejad», Libération, 30 décembre 2005; « Ban on TV shows ’airwaves no longer free in France», BBC Monitoring Middle East, 26 février 2005, Source: Tehran Times, Tehran, in English 26 Feb 05; Agence France Presse, « La semaine judiciaire », 7 juillet 2006

14.Cour administrative d’appel de Paris (4e chambre A), 22 janvier 2002, N° 98PA04225, Reynouard et fondation européenne pour le libre examen historique, Lettre de la Cour administrative d’appel de Paris, n°39, février 2002

15.«Prison requise contre Robert Faurisson pour des propos négationnistes», Agence France Presse, 11 juillet 2006; «Le négationniste Robert Faurisson a été condamné à trois mois de prison avec sursis», Le Monde, 3 octobre 2006; «NEGATIONNISME- Faurisson condamné à trois mois avec sursis», 3 octobre 2006, nouvelobs.com

16.« Condamnation confirmée à trois mois avec sursis pour Robert Faurisson», AFP, 4 juillet 2007

17.«Faurisson-Badinter: décision le 21 mai», Le Nouvel Observateur, 2 avril 2007.

18.Pascale Robert-Diard, «Devant le tribunal de Paris, le procureur affirme que M. Faurisson a tous ’les attributs du faussaire’ de l’histoire», Le Monde, 3 avril 2007.

19. Robert Faurisson perd son procès en diffamation contre Robert Badinter, Le Monde, 22 mai 2007.

20.Isabelle Lasserre, «L’Iran se pose en chef de file des révisionnistes», Le Figaro, 12 décembre 2006.

21. «Information judiciaire sur les propos de Faurisson à Téhéran fin 2006 », AFP, 4 juillet 2007.

Source:

Wikipedia.org

Conseil-etat.fr

Libanvision.com

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